Utopiales 2024


Comme chaque année, un petit billet pour faire le bilan des Utopiales !

Le festival international de science-fiction

Le festival des Utopiales est devenu au fil des années le festival de référence sur la science-fiction au niveau européen.

Il propose plusieurs expositions, un pôle ludique, sa librairie SF, un pôle jeux vidéo, une programmation cinéma, et une programmation dense en tables rondes et rencontres d’auteurs.

Le temps des Utopiales, c’est l’occasion de rencontrer ses auteurs favoris pour une discussion avec eux. Une dédicace. Mais aussi réfléchir sur des sujets de société en conférences, de pousser le genre de la littérature dans ses retranchements. Plus généralement, c’est l’occasion de s’enrichir au contact d’autrui, tant humainement qu’en culture SF.

Voir le festival côté presse

L’invitation presse nous a permis cette année de dénicher deux interviews passionnantes à écouter ou lire, celle d’Alain Damasio, et celle de Patrick K. Dewdney (à paraître le 6 dec), deux auteurs incontournables de l’Imaginaire.

L’édition des Utopiales 2024

Affiche Utopiales 2024Afin de structurer la programmation autour de problématiques plus précises, le festival donne depuis quelques années une thématique. Pour sa 25ème édition, le festival a choisi « L’Harmonie« , pour renouer avec ses origines.

Alors que les années précédentes rencontraient énormément des thématiques liées à la dystopie, cette édition du Festival a apporté un petit air frais par sa programmation, tournée plutôt vers les avenirs désirables.

Ce renouveau est également lié au changement de l’équipe de programmation littéraire, composée désormais de Yann Olivier (éditeur de l’Atalante), Floriane Soulas (Autrice des Oubliés de l’Amas), Eva Sinanian (éditrice et libraire) et Nicolas Martin (ancien pilier de France-Culture).

Affiche 2024 de Emil Ferris

Expositions

Pour la grande exposition d’entrée, nous avons pu découvrir le Freakshow, un montage de planches autour de l’américaine Emil Ferris, l’autrice de Moi, ce que j’aime, c’est les monstres et de l’affiche de l’année. Primée d’Angoulem, Emil Ferris a su conquérir le public français, avec une œuvre faite avec le plus simple matériel… le stylo bille.

En deuxième exposition, le festival nous a présenté l’art d’Aleksi Briclot, dessinateur prolifique pour de nombreux médias, des films Marvel aux cartes du jeu Magic, en passant par le jeu vidéo Remember Me, scénarisé par Alain Damasio.

Tables rondes

Pour notre plus grand bonheur, cette année les conférences ont mises à l’honneur Ursula K. Le Guin avec un parcours atypique autour de Ceux qui partent d’Omelas, mettant en avant une réflexion sur l’utopie autant que sur les manières de renouveler l’écriture de la fiction. Nous avons pu explorer en détails les méandres et implications de la fiction panier, concept d’Ursula K. Le Guin tiré du recueil critique éponyme de 1986. La fiction panier, c’est ces fictions qui arrêtent de raconter l’épopée de l’Humain (excluant par là les femmes) sous l’égide de la lance, des cimeterres et autres gourdins dignes de 2001 L’Odyssée de l’Espace. Des fictions qui plutôt qu’une littérature du conflit très occidentale, s’attachent à un autre imaginaire, celui du contenant, de la cueillette curieuse et exploratrice. L’ambition étant d’arrêter cette littérature qui met face au dilemme du wagon fou, un dilemme obligatoirement perdant, quel que soit le choix effectué ; Ursula K. Le Guin nous propose une troisième voie, le refus du dilemme, ceux qui partent, désertent.

Retour également sur l’œuvre de Francis Berthelot, auteur qui a traversé la fin du XXe, et qui s’est spécialisé dans la transfiction, ces fictions qui chamboulent les frontières des genres à une époque où faire de la SF était un tabou, illégitime. Un voyage entre poésie et SF, édité en blanche.

L’Observatoire de l’Imaginaire :

Pour celles et ceux qui s’intéressent également à la situation éditoriale de l’Imaginaire en France, l’Observatoire de l’Imaginaire a dégagé cette années quelques nouveautés.
Tout d’abord l’Observatoire a rappelé que l’Imaginaire est l’un des rares domaines où la parité dans les parutions et dans les prix est presque atteinte depuis 4 ans. Ils notent également l’explosion de la romantasy, tant en terme de nombre de publications qu’en terme de ventes et intérêt du public. La continuation de la multiplication de nouvelles collections d’imaginaire appui aussi cette reconnaissance nouvelle de l’Imaginaire auprès d’un succès grand public. Cependant l’Observatoire note un recul très net de la couverture médiatique de l’Imaginaire ; avec le rachat centralisé des médias et journaux, de nombreuses rubriques littéraires et d’imaginaires ont disparus. Les Littératures de l’Imaginaire sont devenus mainstream, mais restent sur un socle fragile.

Cinéma : Avant-premières et Rétro

Impossible de tout voir évidemment, les Utopiales proposant pas moins de 86 séances de cinéma sur l’ensemble du festival, mais voici mes quelques pérégrinations…

Ciné-concert de Robocop (1987)

Étrange visionnage que ce ciné-concert, qui mélange de saines réactions d’aversion envers un film qui a très mal vieilli sur ses thématiques, sur le traitement du banditisme, de la critique la police, que le film brosse d’une manière manichéenne et essentialiste. Mais qui, d’un autre côté, donne une dimension iconique par une musique virtuose qui prend aux tripes, menée d’une sacrée poigne par les musiciens du groupe Fragment (Benjamin Le Baron, Tom Beaudouin, et Antoine Gandon). Une version électro et synthé qui accompagne parfaitement le délire des préoccupations sécuritaires critiquées dans Robocop.

Affiche de Hight-RiseHigh-Rise : Rétro

J’avais déjà eu la chance de découvrir High-Rise, Ascenseur pour le chaos il y a des années, lorsque j’avais fraîchement débarqué à la FAC. J’avais adoré le film, et j’ai donc souhaité savoir si, avec le recul, je serais toujours en accord avec ma critique ciné très positive de l’époque. Je n’ai pas été déçu ! J’y ai même vu d’autres lectures et éléments que j’avais manqués la première fois. Un film riche tant sur le fond politique, sociologique, que dans sa réalisation déjantée mais jamais gratuite.

 


Avant-première : Schirkoa : La Cité des fables

Schirkoa : une dystopie où les citoyens portent tous des sacs en papier sur la tête pour effacer toute différence…. Un film d’animation bizarroïde, ouvertement politique, charge contre les dictatures qui prétendent mettre les hommes à pied d’égalité en gommant les différences… et qui, toujours basé sur une critique des récupérations anti-communistes de 1984, a 40 ans de retard.

Profondément réactionnaire, le film, par le biais d’une métaphore peu subtile du sac, s’acharne à critiquer les utopies égalitaristes. Un véritable homme de paille qui pense la volonté d’égalité comme une volonté d’annihilation de l’identité. Il le fait dans une époque ou le fascisme, main dans la main avec le capitalisme, nous propose au contraire un contrôle et une propagande fondée sur la personnalisation à outrance de nos désirs et identités pour les modeler, les classer et les discriminer.
Et quand on pense que le film touchait le fond, Schirkoa tire également sur les espoirs révolutionnaires, en les présentant comme vains. Soit que les révoltes, menées par des gourous, reproduiraient les schémas de domination sans valoir plus que les autres systèmes, soit qu’elles seraient vouées à la mort de la nature même de leur moteur d’existence : elles s’écrouleraient à l’abolition de leur antagoniste totalitaire. Un film qui se veut anti-autoritaire, mais qui, quelque part en chemin, se perd dans son message et la vision du monde qu’il souhaite transmettre.

Un film essentialiste, nihiliste et pessimiste sur le monde, servi paradoxalement par une richesse de réalisation, de trouvailles dans l’animation que l’on retrouve rarement au cinéma.


Prix littéraires

Les Utopiales décernent tous les ans de nombreux prix SF, voici les résultats !

  • Prix Utopiales 2024 : Code Ardant de Marge Nantel, Éd. Mnémos
  • Prix Extraordinaire 2024 : Francis Berthelot
  • Prix Utopiales Jeunesse 2024 : Oxcean de Nicolas Michel, Éd. Talents Hauts
  • Prix Julia Verlanger : Les Sentiers de recouvrance de Émilie Querbalec, Éd. Albin Michel Imaginaire
  • Compétition Internationale de Longs Métrages ; Prix du Jury : Else de Thibault Emin.

Retrouvez le palmarès complet sur le site des Utopiales.

Anniversaires

20 ans de parutions depuis La Horde du Contrevent d’Alain Damasio, les éditions La Volte fêtent un anniversaire bien mérité, au festival qui les a accompagnés de nombreuses années. L’occasion de revenir sur les défis de l’édition, sur l’exigence littéraire qui a toujours été leur ligne, jusqu’à se passer de potentiels succès publics.


Sources & +

1 Commentaire sur “Utopiales 2024”

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