Interview réalisée par : Sayanel
Transcription : Shaé
Date : 1er novembre 2024, aux Utopiales
Second rendez-vous de ces Utopiales 2024, une interview de Patrick K. Dewdney, l’occasion d’un petit retour sur l’œuvre et la pensée de l’auteur du Cycle de Syffe.
Retrouvez ici l’audio (quasi) brut de l’interview :
Interview Patrick K. Dewdney
[Sayanel] : Bonjour Patrick, on est aux Utopiales pour une interview. Est-ce que tu peux commencer par te présenter pour les lecteurs et les lectrices qui ne te connaîtraient pas encore ?
[Patrick K. Dewdney] : Bonjour, je m’appelle Patrick, suis un être humain de la planète Terre. Accessoirement, j’écris des livres. Ça fait un certain temps que j’écris des livres. Je suis là aujourd’hui pour ma fantasy. Je suis en train d’écrire en ce moment le Cycle de Syffe, dont le quatrième tome est sorti cette année. C’est très difficile de parler du Cycle de Syffe parce qu’il y a beaucoup de matière et je ne peux jamais en dire trop sans que ça « divulgâche », comme on dit, un peu tout. Mais c’est un peu le projet de ma vie qui va vraisemblablement prendre quinze ans de boulot, et je suis en plein dedans. Voilà.
[S] : C’est quoi l’aventure qui t’a amené à écrire ça ? Est-ce qu’il y a des lectures qui t’ont vraiment marqué, et t’ont mené à ce Cycle ?
[PKD] : À la fantasy spécifiquement, tu veux dire ? Je ne sais pas si tu connais mon parcours, un peu, parce que moi je suis un faux jeune, j’ai 40 piges. J’ai été publié très jeune, j’avais 23 ans quand mon premier livre est sorti, c’était un polar. Après j’ai fait de la poésie, du roman noir, du roman, un truc qui a été un peu vendu sous double étiquette qui était en vrai du nature writing – courant américain qu’on a voulu francophoniser dans une collection à la manufacture de Lille. Je suis venu à la fantasy un peu tardivement en termes d’écriture pour pas mal de raisons. Parce que c’est un peu mon premier genre, la littérature imaginaire c’est un peu mon dada. J’ai réalisé, d’ailleurs, un M1 là-dessus, sur le croisement entre la théorie sociologique et littéraire, sur le rôle qu’a joué la fantasy auprès des mouvements contre-culturels du XXe siècle. Et du coup, ça m’a un peu mis le pied à l’étrier sur des réflexions. L’une d’elles c’est : c’est super dur d’écrire de la fantasy. J’ai tendance à dire que c’est trois fois plus dur que n’importe quoi d’autre. Parce qu’en fait il faut créer un univers, écrire une bonne histoire (ça c’est le point commun avec tous les genres), mais il faut aussi – troisième point – trouver le moyen de faire entrer le lecteur ou la lectrice dans cet univers qui n’existe pas. Il y a une sorte de triple difficulté qui n’existe pas dans le « vrai roman », comme diraient les académiciens. Et donc j’ai préféré faire mes armes moi sur des one-shots, d’autres genres, de trouver ma voix, v-o-i-x avant de me lancer, de me dire « ça va, là t’as les épaules pour te lancer dans un projet de cet ordre-là ». C’est un projet, disons, qui ramifie, avec beaucoup de choses… Que ce soit d’un point de vue théorique, que ce soit métaphysique, politique, etc. C’est assez dense, je pense… (rires). Pourquoi le Cycle ? Ben parce que je me suis dit à un moment que j’étais prêt du point de vue de la technique pour tenter un truc. Et j’ai tenté un truc et vraisemblablement je ne me suis pas complètement planté puisqu’il a trouvé quelqu’un pour le publier.
[S] : Là je suis en train de penser au personnage de Brindille, je me suis demandé avec l’écriture de ce personnage – on va essayer de pas spoiler – est-ce que tu es plutôt navigateur/architecte, est-ce que tu avais tout prévu depuis le départ ou pas ?
[PKD] : Alors oui, le Cycle, en gros, moi, je sais très très très bien où je vais. Je suis toujours un peu bluffé quand les gens me demandent ça. Je me dis que je vais consacrer 15 ans de ma vie à ce projet, je sais très bien où je vais, ouais. En gros, ma liberté dans le Cycle, c’est que je narre un narrateur. Autant les événements et l’histoire du Cycle je la connais, elle existe. Comme l’univers et le personnage ont été façonnés pour porter un discours. Néanmoins, mon personnage je le respecte suffisamment pour qu’il ait aussi une vie intérieure. Il se trouve que c’est aussi le narrateur. Mon espace de liberté, il est dans la rédaction, je ne sais jamais tout à fait comment le personnage va décider de raconter les choses et j’ai parfois des surprises de ce point de vue-là. Toi, du coup, tu les as lus. Au début du tome 2, il y a ce passage un peu difficile qui dure quelques années. J’avais prévu de le raconter en entier, d’y consacrer…
[S] : J’ai même été étonné de l’ellipse. Je me suis dit : « Wouah, il est en train de résumer en quelques lignes un passage de vie vraiment sombre »…
[PKD] : Ben ouais, et là je me suis lancé, j’ai fait plusieurs tentatives pour essayer d’écrire ce passage-là et en fait j’y arrivais pas. Et j’ai dû me poser pour essayer de décortiquer le problème. Et le problème, il s’est avéré que c’était pas raccord avec la personnalité du narrateur de raconter ça. Plutôt que de s’étaler, il fait un chapitre où il dit j’ai vécu ça, ça, ça, c’était horrible, j’ai pas envie d’en parler, et ça, c’est lui. D’avoir pas envie d’en parler. Et on passe à la suite. Et là ça marchait.
[S] : Autre question. Le Cycle entretient une belle langue très riche, ce vocabulaire, les tournures et la syntaxe… Je l’ai pas pour autant trouvé très pédant, élitiste et je me suis demandé si tu avais cherché à travailler pour chercher à trouver un équilibre particulier.
[PKD] : Oui. Je viens de te parler de mon parcours, j’ai fait pas mal de trucs un peu différents. Je pense que le point commun entre tout ça c’est un rapport à l’écriture, ou à la langue en tout cas comme un rapport un peu artisanal. J’ai en horreur les légendes populaires autour de l’artiste, cet être éthéré vivant d’amour, d’eau fraîche et d’inspiration… la muse… lui tombe dessus… Non, non, c’est du taff. J’ai un intérêt technique pour ce que je fais. C’est un intérêt qui s’est développé au fur et à mesure que j’ai fait des choses différentes. La poésie m’a beaucoup appris là-dessus, cette pratique m’a aidé à développer une théorie de mon propre travail qui est : je considère que mon premier roman c’est mon quatrième roman. Et ouais, j’ai un rapport à la technique qui existe et qui est de travailler. Je pense qu’en matière de réécriture, en gros on est sur 80/85 % de mon travail.
S : Tu as des bêta-lecteurs qui t’aident ?
[PKD] : Ouais, ça fait partie du projet du Cycle. C’est un peu une extension de la façon dont je perçois la littérature… Je crois que la littérature c’est un acte collectif, et c’est toujours une rencontre. Beaucoup de trucs se télescopent avec ce que j’essaye de comprendre de ma discipline avec le temps. Il me semble que, en gros, mon rapport au livre c’est que c’est un objet transistor. L’histoire c’est pas ce qu’il y a écrit dans ton bouquin, c’est ce qu’il se passe quand ce qu’il y a écrit dans ton bouquin rencontre quelqu’un et est intégré par quelqu’un d’autre. Dans cette optique-là, l’aspect technique est très important. Par emploi de sonorités, d’un rythme… tu vas réussir à susciter des choses qui ne sont pas les mots purs et durs. Et du coup tout ce rapport-là au livre en tant qu’objet transistor, à l’écriture en tant qu’acte collectif, c’est littéralement le lecteur ou la lectrice qui crée pour moitié l’histoire. Ce rapport à l’altérité dans la littérature c’est important pour moi. J’ai voulu poursuivre sur ma lancée, c’est une démarche que j’avais déjà sur les bouquins d’avant, mais là je l’ai poussée plus avant.
Je travaille avec une quinzaine de personnes qui me font des retours que je compile. C’est des gens que je peux solliciter sur des sujets particuliers si j’en ai besoin. J’ai une musicologue par exemple, j’ai quelqu’un qui est passionné par les langues, j’ai des gens que j’ai choisies pour ce qu’elles peuvent m’apporter politiquement, par exemple en termes de féminisme. Qui est un sujet que j’essaie d’aborder en ayant accepté de jouer le jeu, d’être dans un vrai travail de propagande, et pas d’être dans une performance politique d’emblée. C’est un discours qui se développe progressivement dans le Cycle. Au début, on est dans un univers clairement patriarcal et en fait le principe du Cycle c’est ça, c’est d’amener un discours qui ne sort pas de nulle part.
Manipulé et malmené au début, Syffe prend de la consistance au fur et à mesure. Comment as-tu réfléchi à la question de se mettre dans la peau d’un gamin de 8 ans ? Ça m’a particulièrement marqué la manière dont il avait déjà, pour un enfant de 8 ans, la narration d’une certaine densité… La richesse du discours et de la narration dès le début alors que c’est juste un gamin de 8 ans c’est marquant.
En fait, j’ai deux sortes de personnes qui me font des retours par rapport au premier tome. C’est des gens qui me disent ce que tu me dis, et des gens qui me disent : « C’est pas du tout crédible ». Et en fait je ne suis pas sur ce niveau d’écriture, j’écris un narrateur, j’écris quelqu’un qui s’écrit. Du coup, le premier tome, quand j’écris le premier tome, mon niveau de lecture c’est que je suis avec le personnage adulte qui est en train d’écrire sa propre enfance, avec ce que ça implique de fantasmes, de différences structurelles avec le reste du Cycle. Le premier tome, en termes de structure, il est un tout petit peu disjoint, un peu plus déstructuré que les tomes qui viennent par la suite parce que j’avais envie de, par d’autres biais, amener une espèce d’insouciance peut-être ou de latence, je ne sais pas. Un truc qui rende l’ambiance, un peu, de l’enfance.
C’est un narrateur compliqué parce que c’est un narrateur adulte qui écrit son enfance, mais ce n’est pas non plus le narrateur qui a fait tout le chemin politique. On n’a pas le recul politique sur sa situation d’enfance et on le voit s’égarer, ne pas comprendre qu’il est manipulé.
Ouais, Syffe il joue là-dessus, il y a un jeu là-dessus. Je suis dans la rédaction du tome 5. Le premier chapitre du T5, il parle de lui en tant que narrateur, qu’est-ce qu’il est en train de faire, quels ont été ses partis pris et ça lui est déjà arrivé d’ailleurs quand il parle dans le T4 de Vaux. C’est quelqu’un qui a conscience d’être un narrateur aussi, et du coup qui interroge son propre récit et son propre rapport à ce qu’est un récit et pourquoi il est en train d’écrire. Ce qui est un peu frustrant pour moi parce qu’il y a des choses que je ne peux pas dire parce que lui ne peut pas les dire. J’essaie de les amener, de les suggérer, mais je ne peux pas les dire ouvertement parce que ce ne serait pas cohérent que le personnage les dise.
La philosophie Var, qui est hyper centrale pour ton protagoniste, est mise en valeur par la narration, mais elle reste quand même distillée au compte-gouttes. On aurait pu penser que tu la mettes en avant beaucoup plus… mais tu l’amènes petit à petit. Est-ce qu’on finira par voir le Pays Var ?
Non, je ne vais pas répondre à ta question ! Mais d’une part, j’ai pas envie d’avoir un discours politique trop frontal dans le premier tome, même s’il y a clairement des partis pris. Pour le dire clairement, j’essaie d’écrire de la bonne propagande. Un truc qui se voit pas trop, ou qui ne s’appuie pas sur des points d’achoppements, forcément, enfin en tout cas c’était l’idée. Et du coup c’est quelque chose qui se développe et continue à se développer dans les tomes qui viennent.
L’autre chose, c’est que, je vais employer un mot que j’emploie souvent en parlant de mon taff. J’ai une approche philosophique, métaphysique, matérialiste de mon univers et du coup les Vars c’est des libres-penseurs, des sceptiques en fait, mais des proto-sceptiques parce qu’ils vivent dans un monde où la technique ne leur permet pas d’incarner exactement le scepticisme… Et même je prends un peu des libertés concernant les connaissances auxquelles ils auraient pu avoir accès, ou qu’ils auraient pu développer avec le temps au contact des autres cultures… Mais surtout en prenant, en considérant, le degré technique auquel ils ont accès. Parce que la pensée, la plupart du temps, naît d’un contexte et les Vars n’ont pas le contexte pour avoir développé une pensée que je qualifierais de pleinement anarchiste. Mais ils tâtonnent, on est autour de ça.
Moi, j’aime beaucoup cette manière que t’as de représenter le monde sous l’angle des rapports de force. T’as posé directement le mot matérialisme, je pense que ça arrive dans cette pluralité de visions, ces rapports, cette violence aussi et je me demandais quelles avaient été les lectures qui t’ont amené à cette vision du monde et comment tu avais choisi de l’incarner dans la narration ? Tu as des livres en tête ?
Quand j’étais plus jeune, j’avais une espèce de sensation ou de conviction qui s’appuyait sur pas grand chose d’un point de vue théorique que j’étais plus ou moins progressiste, plutôt à gauche. Au-delà, je suis vraiment venu à la politique par le biais des sciences sociales, de la sociologie, ethnologie, anthropologie. C’est ça qui m’a aidé à forger… pas des certitudes, mais… À un moment autour de 21-22 ans, je me suis dit : « Bon, qu’est-ce qu’on sait ? À propos de nous. On est là, mais qu’est-ce qu’on sait ? Qu’est-ce que c’est tout ça ? » Je me suis mis à lire d’un coup beaucoup de sciences sociales, je peux te balancer des classiques comme la lecture de Claude Lévi-Strauss qui a été un gros morceau… Mais, si tu veux, c’est vraiment plutôt un corpus que des œuvres en particulier. Au-delà de ce corpus, une espèce de rapport au monde qui est née de ça. De l’idée qu’on peut utiliser des outils intellectuels, la méthode scientifique pour comprendre, faire avancer nos connaissances, tout en gardant de l’humilité et tout en se disant que c’est des données potentiellement invalides, potentiellement il faudra les modifier. Mais, aujourd’hui, je pense qu’on a quand même une compréhension de l’humanité qui est beaucoup plus importante que celle qu’on t’apprend à l’école, notamment sur des points qui pour moi ont été des chevaux de bataille dans mon parcours artistique.
Par exemple, la question de la nature humaine qui est en sciences sociales périmée depuis 60 ans, mais on continue quand même à l’entendre à la télé à chaque fois que tu vas l’allumer. Cette espèce d’idée que c’est inévitable, on est juste comme ça les humains, et c’est un discours – je parle de ce point, mais je peux en évoquer d’autres – qui soutient le statu quo, justifie un ordre social qui est celui dans lequel on habite. Et donc voilà, je suis venu à la politique par ce biais-là, et ensuite j’ai cherché à me définir parce que j’ai acquis un certain nombre d’idées ou de semi-certitudes en lisant les sciences sociales et il se trouve que je suis anarchiste et je suis matérialiste.
Par rapport à ces questions-là, quel impact politique estimes-tu avoir avec tes romans, et à quel degré crois-tu en la littérature engagée ?
C’est une question complexe. J’ai tout à fait conscience d’être une goutte d’eau dans un océan. Pour autant, s’il n’y a pas de goutte d’eau, il n’y a pas d’océan, donc je pars du principe que c’est bien d’essayer. D’essayer de, tout en n’ayant pas d’illusion sur l’impact réel qu’on a, d’essayer de faire quand même, parce que si tu n’essaies pas tu fais pas. J’ai un camarade qui est mort au Kurdistan il y a quelques temps qui, dans sa lettre d’adieu, dit « Chaque orage est précédé par des gouttes : essayez d’être la goutte. ». Et j’essaye d’être la goutte, et j’espère que plus on sera à être des gouttes, plus on arrivera à faire bouger les choses. Après, en fait ta question est compliquée parce que, en gros, on parle d’un média qui est en perte de vitesse, qui est remplacé par d’autres média qui sont beaucoup plus efficaces d’un point de vue purement biologique, à aller susciter, aller taper dans nos circuits de récompense. C’est pas les mêmes choses qui sont en jeu, mais je pense que, par exemple, il y a des gens sur TikTok qui ont quinze mille fois plus d’influence que mes bouquins n’en auront jamais, et je dis pas ça en mode vieux con. Tous les médiums à mon sens peuvent avoir une utilité, ou pas.
Du coup, j’ai quand même des théories à ce propos-là, c’est-à-dire que, malgré tout, nous sommes des êtres à histoires. La fantasy, j’ai choisi ce genre-là parce que c’est à mon sens une extension moderne du mythe, et ce qu’il faut comprendre à propos du mythe c’est que c’est la pépinière d’une société, d’une culture. C’est ce récit-là qui va rassembler un groupe autour du feu, où on va dire d’où on vient et donc on va conceptualiser où on va. C’est aussi l’endroit où on élabore une langue commune, des rapports au monde commun, des concepts communs. C’est ce qui permet littéralement de faire société, même si c’est passé à l’as. Nous, en Occident, il n’en demeure pas moins que notre mythologie chrétienne … je te parlais de la nature humaine… c’est un des ersatz de ça, mais il y en a beaucoup d’autres. Par exemple, par rapport à la nature, l’Occident est extrêmement conquérant : « Multipliez-vous et asservissez la terre ». Bref, je sais plus ce qui est le propos précis de la Genèse. Tout cela définit un rapport au monde.
Et donc une histoire, et notamment ce que Marthe Robert va appeler une histoire des origines, c’est des choses qui vont façonner, nous façonner à des endroits – souvent souterrains – mais en fait très importants dans notre construction. Puisque, comme je te disais, nous sommes des êtres à histoires, nous utilisons la narration pour faire sens de nous-mêmes, pour se situer dans le monde par rapport à l’espace-temps, aux autres, nous incarnons une histoire et c’est de cette façon-là qu’on se projette au monde : par le biais d’une histoire, notre histoire.
L’objet narratif quel qu’il soit, mais là en l’occurrence le livre, c’est quelque chose qui, dans sa structure même, va façonner très littéralement nos circuits synaptiques, de quelle manière nos synapses vont assembler des concepts, des notions entre eux et entre elles. Et donc, autant j’ai conscience que ma contribution à ça c’est une goutte dans l’eau, autant je pense qu’il est important d’aller creuser à cet endroit qui est beaucoup moins anodin que ce que beaucoup de gens essayent de nous faire croire – et je dis pas ça “conspirationnistement”. Je veux dire par là qu’il y a une logique économique qui essaye de dépolitiser la fiction d’une manière générale, et de dire « de toute manière ce n’est qu’un simple divertissement, etc ». Rien n’est qu’un simple divertissement, même un livre de cuisine contribue à normaliser quelque chose. Toute histoire, toute production artistique ou périphérique à l’art statue d’une manière ou d’une autre sur le monde et donc a un impact politique. Et je pense que c’est important de savoir où on se trouve là-dedans, et de le théoriser aussi, je crois vraiment que l’artiste a une responsabilité sociale de ce point de vue-là.
Pour la fin, est-ce qu’il y a quelque chose que tu voudrais dire à tes lecteurs et lectrices ?
Merci. Surtout ça que j’ai envie de dire. Comme je disais tout à l’heure, la littérature pour moi c’est un acte collectif et du coup cet acte collectif ne peut pas avoir lieu si je suis tout seul dans mon coin. Au-delà du fait que vous contribuez à ce que mes histoires existent, très littéralement, c’est aussi grâce à vous que je survis au capitalisme donc à part merci je vois pas trop ce que je pourrais vous dire.
Très bien, merci beaucoup Patrick.
De rien.
Sources & +
- Merci à Patrick K. Dewdney pour l’interview et au festival des Utopiales pour l’accueil.
- Merci à Shaé, pour la transcription, à Ilfasidrel pour la correction.
- Le Cycle de Syffe, aux éditions Au Diable Vauvert.