Fuck FIG : Témoignages


Ayant participé à l’écriture de l’article Fuck FIG : Ne commencez pas le Parkour avec la Fédé de Gym, je vais me permettre ici un retour d’expérience plus personnel sur le Parkour à la FIG.

Retour d’expérience

J’ai fait de la gym pendant 8 ans, en commençant au primaire et en ne m’arrêtant qu’à mon arrivée à la fac qui ne m’a pas permis de continuer. Je pratique aussi le parkour depuis maintenant 7 ans. J’ai commencé avec la FIG, à côté de mes cours de gymnastique, avant de commencer une pratique indépendante et en extérieur suite à plusieurs rencontres d’autres traceur.euses. Malgré tout ce qui est dit dans l’article, j’aime énormément la gymnastique. C’est un sport qui m’a énormément appris et je ne serai pas la personne que je suis aujourd’hui sans elle. J’ai construit mon rapport au corps et ma proprioception en grande partie avec cette discipline, et aujourd’hui encore je prends beaucoup de plaisir dans la pratique de mouvements gymniques.
Cependant, les critiques qui sont faites à la FIG sont légitimes. La fédération de gymnastique n’a rien à faire avec le parkour, pour toutes les raisons déjà évoquées. (Je tiens à préciser, pour la suite de mon propos, que je ne m’appuie que sur mon expérience dans 1 seul club de la FIG qui ne représente probablement pas toutes les manières de fonctionner de la FIG).

Quand on sort de la FIG, et qu’on commence à pratiquer le parkour de manière indépendante et extérieure, on découvre vraiment une nouvelle discipline à part entière. Évidemment que la pratique en salle aide, elle permet une bonne condition physique et une certaine connaissance des mouvements, mais il est beaucoup plus cohérent de commencer directement le parkour en extérieur, et cela permet d’appréhender la pratique dans son intégralité. En salle, le travail n’est pas du tout le même, et dans mon club, 100% de notre pratique du parkour était en salle. On utilisait les agrès, blocs en mousse et tapis comme obstacles. Sur environ 2 ans de pratique, on a dû avoir 2 ou 3 séances en extérieur, grand maximum, auxquelles je n’avais pas pu aller, car elles n’étaient pas sur nos horaires habituels.
En parkour, les sensations et le travail mental sont une part très importante de la discipline, presque plus que l’apprentissage des mouvements. Le mental est aussi travaillé en salle mais ça n’a rien à voir. La sensation de vide qu’il est possible de travailler en salle n’est que très limitée, et les textures le sont aussi ; vous n’apprendrez jamais à atterrir sur du béton, de l’herbe, du sable, des graviers ou n’importe quelle autre texture extérieure en salle. Et ça change tout.

Les philosophies de la gym et du parkour sont aussi très différentes et c’est pourquoi il me semble très important de garder ces disciplines séparées. La gym est très codifiée. La création a peu sa place dans la discipline, tout comme l’expression de soi. La performance, elle, domine. À l’inverse, dans le parkour, à l’origine, la création est fondamentale et la performance l’est moins. En gym, les mouvements doivent être parfaitement exécutés pour marquer des points, tandis qu’en parkour, tout le monde a sa propre manière de faire une même line. L’expression de soi se retrouve aussi sur les codes vestimentaires : impossible de faire de la gym sans le bon justaucorps, les jambes parfaitement épilées pour les femmes, là ou en parkour, les tenues sont diverses, les styles aussi, et oh bonheur je peux pratiquer les poils aux jambes sans me sentir jugée. Sur le plan des codes genrés, le parkour a beau être un sport encore très masculin, je connais beaucoup de personnes trans et non-binaires qui pratiquent, là ou je n’en connais aucune en gym. Le fait que la discipline ne soit pas coupée en deux par le genre comme l’est la gym aide beaucoup. La seule chose qui compte, quand on regarde un mouvement, ce sont nos capacités physiques et mentales, pas notre genre. Le parkour se pratique aussi dans tous les espaces, rues, toits, explorations et urbex pas très légaux, là ou la gym se pratique toujours au même endroit, toujours dans la légalité.

Si j’insiste autant sur toutes les différences entre gym et parkour, c’est parce que le parkour proposé à la FIG est un médiocre mélange de ces 2 états d’esprit, où l’esprit gym est majoritaire. À la FIG, mes cours de parkour étaient presque majoritairement occupés par l’apprentissage du freerun. J’étais la seule fille du groupe, les autres pratiquants étaient des mecs pour la majorité torse nu, je me faisais appeler « bonhomme » quand je pratiquais avec eux et il fallait s’accrocher pour ne pas avoir le syndrome de l’imposteur, parque que je n’étais pas capable de faire la plupart de ce qu’ils faisaient, surtout en freerun. En 2 ans, comme je le disais, j’ai dû aller une fois dehors, sur une séance assez courte. On avait des moments d’ « évaluation » où on nous testait sur différents mouvements et selon ce qu’on réussissait à faire, on avait le droit à un bracelet niveau 1, 2, 3… Bien sûr, avec une partie freerun. Si vous pensez que la salle évite les blessures, je me suis fait ma première entorse dans ce cours et mon encadrant s’était cassé le pied. Aujourd’hui, je suis encore ce club sur instagram, et je sais qu’ils ont fait des événements de « repérage », où des grands noms du parkour compétitif venaient repérer les jeunes « à potentiel ». Je sais aussi qu’ils participent régulièrement à des compétitions. Le tout en salle. Petit aparté politique, mais j’avais recroisé un gars qui faisait du parkour avec moi dans ce club en train de tracter pour la cocarde étudiante (groupe étudiant d’extrême droite). Je ne dis pas que le parkour hors FIG est toujours engagé ou politiquement à gauche, je sais que c’est faux, mais j’ai tout de même trouvé dans la communauté du parkour beaucoup plus de gens politisé.es et inclusif.ves que je ne l’ai jamais vu durant mes 8 années à la FIG.
Bref, le parkour qui est pratiqué là-bas n’a rien à voir avec le parkour de la FPK ou des indépendant.es. Ce n’est tout simplement pas la même discipline.

Mon but n’est pas de cracher sur les pratiquant.es à la FIG, que ce soit de “parkour” ou de gym. J’ai moi-même été l’une d’entre elles et j’entretiens toujours des bonnes relations avec ce club et mon entraîneur. J’ai commencé le parkour grâce à elleux et j’en suis reconnaissante. Mais le fait est que la philosophie de la FIG n’est pas celle du parkour, qu’elle est très compétitive et genrée, peu inclusive, voire carrément toxique (cf le doc Arte). À un point que j’aimerais même voir la gym sortir de la FIG, qu’on puisse pratiquer les agrès qu’on veut peu importe notre genre, avec moins de codes, sans compétition si on le souhaite. Mais c’est un souhait assez irréaliste, du fait de l’histoire de la gymnastique. Le parkour, par contre, est une discipline récente, avec plein de promesses, et j’aimerais vraiment ne pas le voir se faire manger par la FIG. S’iels veulent continuer à faire ce qu’iels proposent, voir même le mettre aux JO, ça ne sera pas du parkour, donnez lui un autre nom.


PS: Si vous aussi vous avez fait de la gym et du parkour ou du parkour avec la FIG, et que vous voulez ajouter des éléments ou raconter comment ça s’est passé pour vous, n’hésitez pas à commenter sous cet article !

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