Je profite de l’été pour reposter de vieilles critiques ciné… Si ça peut donner des idées de films à voir =)…
Psiconautas / Psychonautes
31 Mai 20217
Après un court-métrage brutal et déroutant faisant office d’introduction, le film d’animation espagnol se lance par contraste délicatement sous mes yeux. Avare en mots et en couleurs, immédiatement se dessine un tableau d’une violente douceur : je suis plongé dans la noirceur d’un monde dessiné mais criant de réalisme. Crier. C’est le mot qui vient à l’esprit ensuite. Car l’intrigue est comme un bâillon posé de force sur ses personnages, alors que leurs âmes et leurs cœurs hurlent aux larmes une indicible souffrance.
Psychonautes, c’est l’histoire de Dinki et Birdboy, deux jeunes personnages dérivant sur l’absurdité du monde, cherchant à lui échapper sans cesse. Leur but : fuir leur île apocalyptique, victime d’un accident industriel, qui les enferme moralement et physiquement dans une société qu’ils rejettent malgré eux. Une (dé-)route de désillusions remplace le voyage initiatique. Par delà le cœur, la philosophie, l’adolescence et jusqu’aux drogues, défilent à l’écran la longue liste des mélanomes de notre société, poussée dans cet univers crayonné, à l’extrême. Perdus dans leur tête et dans leur rapport au monde, Dinki et Birdboy, voient autour d’eux s’effondrer un à un les repères essentiels à l’intégrité de l’humanité, jusqu’aux plus élémentaires comme la famille, ou encore l’école.
Psychonautes, c’est aussi un bain bouillant de poésie et symboles forts. Poésie qui retraverse des thèmes universels comme l’Amour, la Solitude ou le voyage. Symboles violents qui marquent par image la dureté sans pitié de la réalité des personnages. Un film qui jongle entre le noir et blanc d’une infinie tristesse, et quelques touches de couleurs, symboles de quelques espoirs effilochés et privés d’avenirs. L’Intrigue avance à la manière d’un navire qui descendrait de vers en vers le long d’un doux poème, chemin inexorable vers une fin au paroxysme de sa triste absurdité.
Pour aller plus loin, disons que le film semble moins accessible que l’album originel du même auteur (Éditions Rackham), par ces innombrables références et son »découpage », mais cela ne lui nuit pas le moindre instant. Sa poésie transporte à coup sûr dans son univers. C’est un film dont on pourrait parler des heures tant sa recherche sur le fond et la forme (si tant est que l’on puisse séparer ces deux-là), est poussée. L’Esthétique est merveilleuse, plus encore poussée que dans Quelques Minutes après Minuit (Patrik Ness). Ce film est mon coup de cœur de l’année et de loin. À VOIR ABSOLUMENT ! Par ailleurs, en anecdote, j’ai eu l’exceptionnelle chance de rencontrer le scénariste/réalisateur par hasard aux Utopiales de Nantes lors de son Avant-Première, et de faire dans la foulée la dédicace de l’album, jamais je n’oublierais ce moment je pense. Pour conclure, et pour décrire sauvagement et caricaturalement ce film, on pourrait en dire qu’il serait un mélange réussi d’une poésie Tombeau des Lucioles et d’un style Tim Burton. Regardez ce film. Partagez ce film. S’il vous plaît, il le mérite. Et plus que pour le mérite, pour sa Poésie.
Parution originale : Blog des Ambassadeurs du Cinéma – Angers 400 Coups, Mai 2017
https://ambassadeurscineangers.wordpress.com
Reposté sur Marchombre.Fr le 19 juillet 2024 car le site original n’existe plus.